À l'échelle mondiale, plus d'un milliard de personnes[i] vivent avec un handicap. Même si c'est un fait, cette donnée démographique est très souvent oubliée, notamment lorsqu'il s'agit d'étudier la manière dont ces personnes achètent et consomment les produits du quotidien.
En effet, d'après une étude menée par le Royal National Institute of Blind People (RNIB), quatre personnes malvoyantes sur dix[ii] se sentent isolées du monde qui les entoure. L'inaccessibilité des informations et l'exclusion numérique sont des facteurs qui contribuent à ce sentiment d'isolement.
Lorsqu'on sait que moins de 10 % des organisations ont un plan ciblant le marché des consommateurs handicapés, on comprend qu'il s'agisse d'une immense source de frustration pour les personnes en situation de handicap, mais également d'une énorme opportunité négligée par les fabricants et les fournisseurs.
Les choses doivent changer. L'inclusivité devrait faire partie intégrante des promesses des marques et, même si de gros progrès ont été accomplis ces dernières années, la technologie a souvent été un facteur limitateur dans ce domaine. Toutefois, aujourd'hui, on constate que l'innovation et la collaboration aident à surmonter ces obstacles.
Que ce soit pour améliorer l'expérience d'achat dans les magasins ou accroître la facilité d'utilisation des objets du quotidien, il existe des technologies capables de rendre les emballages et l'étiquetage des produits plus accessibles et inclusifs, comme l'explique Rob Elinor, Programme Manager chez Domino.
La considération avant la conformité
Les personnes en situation de handicap représentent la plus grande minorité du monde, selon l'OMS. Et pourtant, en matière de normes concernant l'accessibilité des informations, cette catégorie de consommateurs est très mal représentée. Prenons l'exemple des emballages alimentaires. La Food Standards Agency oblige à indiquer certaines informations et à leur appliquer une taille minimum de police. Mais ces normes sont largement inadaptées aux personnes malvoyantes et tout simplement dépourvues de sens pour les personnes non-voyantes.
Dans cet exemple, la conformité aux normes de base n'a pas de réel intérêt pour le client et ne témoigne en rien de la responsabilité sociale d'une marque. La solution serait de traiter tous les clients avec la même considération. Heureusement, de plus en plus de marques prennent conscience de ce besoin d'inclusivité. Les fabricants et leurs fournisseurs qui savent anticiper collaborent avec des groupes de personnes handicapées. Ils investissent dans des initiatives auprès de leur personnel pour le sensibiliser aux besoins des personnes en situation de handicap. Ils étudient et identifient de nouveaux moyens de rendre les produits plus accessibles, notamment ceux dont les similitudes d'emballages peuvent prêter à confusion, voire entraîner des risques.
Comprendre le contexte
Les marques qui souhaitent rendre leurs produits plus accessibles et inclusifs doivent avant tout comprendre le contexte d'utilisation de ces produits. Par exemple, l'expérience d'achat pose des difficultés très différentes de celles liées à l'utilisation quotidienne de la plupart des produits.
Les informations importantes pour les « courses de la semaine » (par ex. informations nutritionnelles, allergènes, dates limites de consommation) doivent être communiquées de sorte à être accessibles en ligne et en magasin, afin que les personnes handicapées puissent les acheter sans l'assistance des vendeurs ou de leurs accompagnants. Très souvent, l'expérience d'achat est plus simple en ligne qu'en magasin, mais les marques et les distributeurs souhaitent que la technologie puisse faciliter l'expérience d'achat physique via des applications mobiles avec des lecteurs audio, ou des codes QR liés à des descriptions audio, entre autres possibilités.
Mais ces applications sont nettement moins utiles en ce qui concerne l'utilisation d'un produit au quotidien. Devoir scanner les emballages alimentaires de son placard avec un téléphone pour différencier la mayonnaise du ketchup, par exemple, ou pour différencier la farine normale de la farine avec levure, ce n'est pas pratique. De même si l'on veut différencier le shampoing de l'après-shampoing sous la douche.
Devoir mettre un élastique autour de la crème de nuit pour la distinguer de la crème de jour (une stratégie souvent utilisée par les personnes non-voyantes ou malvoyantes pour ne pas se tromper), non seulement c'est agaçant, mais cela prend du temps, cela peut provoquer des erreurs. Cela contribue au sentiment d'isolement et conduit à une expérience de marque qui est loin d'être optimale.
Alors comment les marques peuvent-elles rendre leurs produits plus accessibles ?
Un étiquetage inclusif
Dans ce domaine, plusieurs grandes organisations font office de pionnières. Parmi elles, Procter and Gamble, sous la supervision de Sumaira Latif, Company Accessibility Leader et, accessoirement, première femme britannique d’origine asiatique et aveugle à être nommée Directrice adjointe.
Depuis la nomination de Sam, P&G a lancé des produits tels que son test de grossesse ClearBlue sur la plateforme « Be My Eyes », afin que les consommatrices malvoyantes puissent obtenir les résultats de leur test de grossesse par vidéoconférence. Le groupe a ajouté la description audio à toutes ses pubs TV. Et, fait important, il organise désormais des défis pour ses dirigeants et son personnel afin de les aider à se mettre à la place des consommateurs handicapés. Ce qui, selon Sam, « permet de comprendre concrètement l'impact potentiel des petits changements. Le fait de rendre nos produits plus accessibles donne plus de sens à nos produits et services, et cela rend nos équipes plus passionnées, plus engagées et plus motivées pour réussir. »
En collaboration avec l'équipe Codage et marquage de Domino, P&G a également mis en place des repères tactiles sur sa gamme de shampoings et d'après-shampoings Herbal Essences bio:renew. Ces repères tactiles, qui ont été ajoutés sur les bouteilles après soufflage à l'aide d'un laser CO2, ont pour but d'aider les utilisateurs malvoyants à distinguer les différents produits lors de leur utilisation. Ce simple ajout contribue à faciliter l'utilisation des produits au quotidien. Comme l'explique Sam, personne n'a envie de devoir être aidé par une tierce personne pour trouver la bonne bouteille, surtout dans un endroit aussi intime que la douche.
Le potentiel des repères tactiles comme solution inclusive pour les consommateurs non-voyants ou malvoyants est énorme. Non seulement cette solution pourrait aider à différencier les produits, mais elle pourrait aussi être utilisée pour indiquer la présence d'un code 2D fournissant des informations supplémentaires, ou pour faciliter l'expérience d'achat en magasin.
De plus, l'inclusivité ne concerne pas que les consommateurs handicapés. Les solutions tactiles peuvent aussi être utilisées pour rendre certains produits plus faciles à utiliser pour les consommateurs âgés ou invalides. Par exemple, on pourrait utiliser un codeur laser pour créer une gravure qui permettrait aux personnes ayant une force de préhension réduite de mieux agripper les emballages décollables. De même, les repères tactiles visuels et la symbologie aident les consommateurs qui ne parlent pas la langue à comprendre les informations clés, comme une lune imprimée sur l'emballage d'une crème de nuit et un soleil sur la crème de jour.
Tous ces exemples sont importants si l'on veut aider toutes ces personnes d'une manière ou d'une autre à être plus indépendantes.
Conclusion
L'inclusivité n'a jamais été aussi importante. Pour les industriels, rendre les produits plus accessibles est plus qu'une obligation sociale ou morale. C'est la meilleure chose à faire. D'un autre côté, les marques ne peuvent pas se priver de l'opportunité commerciale que représente ce marché élargi. Elles ont tout intérêt à fidéliser une clientèle qui s'est jusqu'à présent sentie négligée et isolée.
Les marques peuvent collaborer avec leurs fournisseurs pour trouver des idées et des solutions innovantes qui leur conviennent. Les partenaires de codage et de marquage peuvent proposer différentes solutions, qu'il s'agisse d'imprimer des codes QR et Data Matrix ou de créer des emballages tactiles avec codage laser et étiquettes texturées, qui peuvent fonctionner en tant que solutions autonomes ou combinées.
Il existe désormais des technologies capables de rendre les informations plus accessibles. Il n'y a plus qu'à les mettre en œuvre. Après tout, les avantages sont multiples. Comme le dit Sam : « C'est du positif pour les consommateurs handicapés, qui étaient souvent délaissés jusqu'ici. Et c'est du positif pour votre entreprise, car les employés aiment que leur travail aient du sens et pour eux, voir l'impact de leur travail sur la vie des personnes est très gratifiant. »
[1] Département des Affaires économiques et sociales des Nations Unies, Factsheet on Persons with Disabilities, consulté le 7 juin 2021. https://www.un.org/development/desa/disabilities/resources/factsheet-on-persons-with-disabilities.html
[1] RNIB, My Voice, consulté le 7 juin 2021. https://www.rnib.org.uk/knowledge-and-research-hub-research-reports-general-research/my-voice